Du fanatisme. Quand la religion est malade

Au moment même où la France devait faire face à une nouvelle vague d’attentat terroriste, le jeune dominicain du Caire publiait un essai bienvenu sur le fanatisme religieux.

L’auteur définit son travail comme « modeste dans ses dimensions [et] dans ses ambitions ». Il aurait pu rajouter « et stimulant pour la réflexion de ses lecteurs ». La preuve en est que ce livre a été largement évoqué par la presse française car venant soutenir les Français en pleine sidération devant l’impensable : la décapitation d’un enseignant et l’égorgement de fidèles en prière. C’est pourtant un autre drame qui est à l’origine de cet ouvrage : l’assassinat à Glasgow, à Pâques 2016, d’un épicier pakistanais de quarante ans qui avait tout simplement posté sur son compte Facebook un « Joyeuses Pâques à mes chers concitoyens chrétiens ! ». Le terrorisme est donc malheureusement universel et touche tous les continents. Il est le fruit du fanatisme et, en l’occurrence, religieux.

La présente réflexion d’Adrien Candiard est autant celle d’un islamologue que d’un croyant chrétien. Il témoigne de ce que ce fanatisme est pour lui source de souffrance et de questionnement. Ce n’est donc pas seulement la raison qui parle, mais aussi l’affect et la foi.

Le livre est partagé en trois parties, vraies balises pour le lecteur dans la tempête : Les raisons d’une folie, Le culte des idoles et Chemins d’iconoclasme. Mais ce qui est passionnant dans la lecture, c’est que nous ne sommes pas seulement plongés dans la réalité contemporaine. En effet l’auteur nous évoque aussi Voltaire, les guerres de religion et, avant tout, à travers l’un de ces avis juridiques, un homme du XIIe siècle qu’il connait bien, un théologien et jurisconsulte musulman de l’école hanbalite, Ibn Taymiyya.

Entre l’avis juridique d’il y a quelque siècle, la fatwa de Glasgow de Pâques et les drames de l’automne 2020 en France, le point commun est « une théologie dont Dieu est absent, sauf sous forme de commandements », ce qui serait finalement une « théologie du refus de la théologie ».

Car la thèse défendue par Adrien Candiard est que « le comportement fanatique n’est pas seulement le produit de traumas psychologiques ou de la relégation sociale : le fanatisme est aussi le fruit, parfois assez direct, de certaines théologies, de certaines conceptions de Dieu et de notre capacité à le connaître » (p. 40). Mais il va plus loin. Pour lui, ces théologies « sont des théologies qui ont mis Dieu à l’écart » (p. 42). Or le danger pour le croyant, qu’il soit juif, chrétien, musulman, est « de confondre avec Dieu, de considérer comme absolus, des objets qui touchent à Dieu ou qui viennent de lui » (p. 52). Or Dieu seul est absolu et tout ce qui n’est pas Dieu est relatif. Il y aurait danger à idolâtrer sa propre religion.

Les Ecritures sacrées, les rites, les avis juridiques sont des éléments excellents et nécessaires. Mais ils ne sont pas tout. Ils sont des chemins pour aller à la rencontre de Dieu et des hommes. Il n’en reste pas moins qu’il ne nous faut pas les absolutiser. Souvenons-nous que seul Dieu est Dieu. Méfions-nous donc des idoles que nous pourrions créer !

Aussi notre auteur nous propose trois remèdes pour éviter de tomber dans le fanatisme : la réflexion théologique, le dialogue interreligieux et la prière, personnelle et silencieuse. Oser en user, ce sera entrer dans une belle aventure spirituelle à vivre en fraternité avec tous !

Vincent Feroldi

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