Rémi Caucanas, Etienne Renaud. La passion du dialogue

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Avec minutie, l’auteur, Rémi Caucanas, a rassemblé en un même ouvrage les nombreuses contributions écrites d’Etienne Renaud (1936-2013), les présentant en cinq séquences : Un dialogue recherché, Une palettes de couleurs arabes, Dialogue et mission : la forme et le geste, La nuance du trait et Touches finales. Sont aussi données une chronologie d’Etienne Renaud, une carte des postes missionnaires qui furent les siens et une imposante bibliographie (13 pages). Il en résulte un ouvrage à deux facettes : un recueil d’articles de premier plan d’Etienne Renaud et une biographie de celui qui fut supérieur général de la Société des missionnaires d’Afrique de 1986 à 1992.

Premier constat. Les nombreux voyages et insertions et la multiplicité des personnes rencontrées ont amené Etienne Renaud à découvrir la diversité des pratiques de l’islam. D’où une tension entre l’aspect sociologique, voire politique, de l’islam, et sa dimension religieuse et spirituelle qui mène à l’intime de la personne. Ni islamologue, ni théologien au sens universitaire du terme, il est animé de belles intuitions spirituelles et se considère comme l’homme des « tâches initiales ». Ainsi, le fait de vivre en « terre d’islam » l’invite à adopter une attitude contemplative, à mettre en œuvre la réflexion de Massignon : « On ne trouve la vérité qu’en pratiquant l’hospitalité » et à se garder de tout esprit de possession car, comme le disait Abraham Lincoln, « ne soyons pas pressés de dire que Dieu est de notre côté. Prions pour être du côté de Dieu ». Ce long compagnonnage lui permet, en 2012, de résumer par une expression lapidaire ce qui lui apparait être la différence essentielle entre l’islam et le christianisme : « Dans l’islam, Dieu donne ; dans le christianisme, Dieu se donne ». Deux facettes du mystère de Dieu à méditer, habité d’humilité.

Par ailleurs, à travers ses écrits et vie, nous sommes plongées dans les méandres de ses soixante dernières années et pouvons nous souvenir d’une actualité internationale abondante, d’une vie ecclésiale dynamisée par Vatican II, du développement du wahhabisme et de l’extrémisme musulman, de la vitalité plus ou moins forte des relations islamo-chrétiennes, de l’évolution d’une Société de missionnaires qui s’internationalise peu à peu tant par ses membres que par ses nouvelles implantations…

Des écrits d’Etienne Renaud surgissent quelques belles convictions, porteuses d’avenir, car pour peu que nous soyons des passionnés du dialogue, elles peuvent les nôtres en ce XXIème siècle : « Vivre l’Evangile avant d’en parler, établir avec tout homme une rencontre vraie dans le respect mutuel, suivre le Christ dans sa passion pour la réconciliation, ne pas mettre par notre étroitesse des frontières au mystère de Dieu » (p. 240). Cela n’est nullement en contradiction avec le fait de reconnaître que la pratique du dialogue est et demeurera un véritable défi. Car, comme Etienne l’a lui-même vécue personnellement, il existe au plus profond de l’être du disciple du Christ une tension qui procède de la démarche de l’amour : « D’un côté, on veut aimer l’autre tel qu’il est et tel qu’il veut être, en ce qu’il a de différent. De l’autre, on veut partager avec lui ce que l’on a de meilleur, de plus précieux, notre foi » (p. 215).

Comme un testament résonnent alors ces dernières traces écrites par Etienne Renaud en 2013, peu de temps avant son décès, lui qui estimait avoir été invité par Dieu à « élargir l’espace de sa tente » : « Nous sommes appelés à rechercher un chemin d’unité qui va au-delà de ce que chacun peut embrasser dans sa foi individuelle, une sorte de tension commune vers l’unité qui nous invite à relire toute la problématique développée jusqu’à présent dans une perspective globale de la présence de Dieu dans l’histoire et la vie de toute l’humanité, d’un Dieu « qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité ». (1 Tm 2,4). Nous sommes invités à percevoir la recherche de Dieu comme un bien commun de toute la famille humaine et la parcelle de foi qui est en chaque homme fait partie de ce bien commun » (p. 414).

Vincent Feroldi

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